04/07/2006
Biblio : L’art de la mémoire F.A Yates
Frances A Yates, historienne anglaise qui a principalement écrit sur la Renaissance, a publié en 1966 son chef d'oeuvre "the art of memory" qui mettra près de 10 ans à être traduit en français. Cet ouvrage est une vaste fresque des techniques de mémoire artificielle largement utilisées de l'Antiquité au début de la Renaissance. Cette somme de connaissances, encore très originale plus de quarante ans après, est toujours abondamment citée.
Cette histoire commence avec un mythe fondateur, celui de Simonide de Ceos, poète de la Grèce Antique réputé pour sa prodigieuse mémoire. Il avait acquis cette capacité dans des circonstances bien particulières. Alors qu'il assistait à un banquet, le toit s'écroula pendant son absence momentanée " les cadavres étaient à ce point broyés que les parents (...) étaient incapables de les identifier. Mais Simonide se rappelait les places qu'ils occupaient à table et il put ainsi indiquer aux parents quels étaient leurs morts." A la suite de cet événement dramatique, Simonide comprit qu'une disposition ordonnée
rangée dans une image mentale est essentielle à une bonne mémoire. Ainsi, pour se rappeler de longs discours, il associait des parties de son oraison à des objets et des endroits dans un temple. Quand il prononçait son discours, il revisitait mentalement le temple pour faire appel à ses idées dans un ordre logique.
Yates définit l'art de la mémoire comme " le vieux, très vieux labyrinthe : règles pour les lieux, règles pour les images, mémoire pour les choses, mémoire pour les mots". Elle ajoute "Nous savons tous que, quand nous tâtonnons pour nous rappeler un mot ou un nom (...), quelque chose qui s'est enracinée dans la mémoire peut nous aider à faire sortir ce que nous cherchons. L'art classique systématise ce procédé". L'art de la mémoire s'appuie donc sur une métaphore spatiale. Pour être efficace, cette vision mentale doit s'appuyer sur des "images frappantes". Très tôt, les penseurs reconnaissent que si les faits eux-mêmes donnent une information plus exacte, " les métaphorica émeuvent l' âme davantage et aident donc mieux la mémoire". Il est donc plus efficace de mémoriser une image mentale que d'apprendre par coeur.
Ces techniques ont été essentielles dans le destin de l'humanité. Ce sont elles qui ont assuré la diffusion des connaissances à un moment où les rares manuscrits n'étaient pas transportables.
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